Tuesday, June 22, 2010

Le Baiser du barbu


Les comparaisons sont toujours inévitables lorsque vient le temps de présenter sa 2e œuvre. Surtout si la première fois on fut auréolé du succès critique, commercial en plus d’avoir gagné des prix, dans ce cas-ci, des Jutras. Personne n’y échappe que ce sois Dolan dernièrement ou Podz ou Huard dans un avenir rapproché, tout le monde y passe, tout le monde veut s’assurer que la première fois fut 1)un véritable chef-d’œuvre digne d’un visionaire surdoué ou 2) un erreur de parcours, une imposture où l’artiste n’a pas sa place dans le cinéma d’ici. Ce qu’on peut être dur et contradictoire.

Le Baiser du barbu est donc, la 2e œuvre d’Yves Pelletier(RBO, 2 Secondes) derrière la caméra. La barre est haute puisqu’il avait remporté le Jutra du meilleur scénario pour Les Aimants et que le côté Feydeau-esque(je ne connaît rien en théâtre) donnait un vent de fraicheur à son film.

Avec son nouveau film, Pelletier reste en terrain connu, la comédie romantique. Toujours rempli de personnages secondaires attachant. Par contre, cette fois, ça ne fonctionne pas. Il est difficile de dire pourquoi puisque le ton sympathique et la qualité de l’interprétation est sans faille (sauf pour Ricardo Trogi, bien que sympathique, il ne sait tout simplement pas jouer et Louis-José Houde qui est plus une caricature qu’un personnage), l’idée de base est farfelue, un peu comme La Moustache d’Emmanuel Carrère(le livre) mais sympathique. Il utilise le théâtre et le cinéma comme toile de fond mais le scénario est vide. Il n’y a pas vraiment de blague même si le film n’est pas dénué d’humour, c’est juste que jamais le film ne suit le canevas de base, jamais il n’arrive quoique ce soit à Benoit(David Savard) pour qu’on croit qu’il est chanceux ou pour qu’on croit que tout ça vient du fait que sa barbe peut ou non être magique. Jamais on a le temps d’y croire puisqu’absolument rien ne se produit mis à part qu’il frenche une fille cute(Bénédicte Décary) et qu’il aura peut-être mais-c’est-pas-super-sûr-tsé-veut-dire un rôle dans un film de Louis-José Houde-avec-une-mèche-qui-s’exprime-avec-anglicismes.

En 2e partie, la loi 101 de la comédie romantique prend le dessus et le film essaie beaucoup trop d’être cute tout en essayant de créer un espèce de constat genre : « L’art imite la vie » ou vice versa. Les personnages se séparent de façon artificielle pour arriver à une conclusion qui tourne en rond. Alors qu’il n’a absolument pas besoin de prendre cette tangente, le film se perd un peu dans les ambitions ratés du personnage de David et la psychologie à 5 francs du psychiatre joué par Alexis Martin. En plus de voir le couples d’amis (Bourgeois-Leclerc et Legendre (Pierre-François, pas Joël)) devenir des caricatures de couples d’amis et perdre ce qui aurait pu être une profondeur additionnelle au récit.

Pelletier filme avec une sensibilité qu’il lui est propre et c'est ce qui donnait à Les Aimants sa force. On dirait, avec Le Baiser du barbu, qu’il aurait voulu en montrer davantage ou qu’il aurait voulu mieux définir ses personnages, ou dire quelque chose sur le destin, sur l’art, sur l’amour. Comme s’il avait écrit son scénario à la hâte en oubliant pourquoi il l’avait écrit ou comme s’il n’avait pas réussi à mettre sur papier ce qu'il avait en tête. Le film perd donc de son intérêt au fur et mesure que l’on s’apercçoit qu’il n’y a pas vraiment d’enjeu et que le happy end forcé est maladroit d'autant plus que le personnage d'Isabelle Blais n’est pas l'obsédée romantique en manque de gratification qu'elle semble être devenu à la toute fin.

Il faudra attendre le prochain film de Pelletier pour voir si Le Baiser du barbu n’est pas qu’un erreur de parcours. En espèrant ne pas attendre 6 ans, cette fois.

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